Le pays Toraja

Après 8h de bus de nuit depuis Makassar (avec wifi, svp!), nous arrivons à Rantepao, la « capitale » du pays Toraja.

Ici la végétation est luxuriante; palmiers, bananiers, cacaoyers et champs de riz germé, soit tout vert, à perte de vue.

Les Torajas, c’est un peuple très ancien qui vit dans les forêts montagneuses et qui mélange christianisme et rites animistes ancestraux. Les maisons en bois, appelées Tongkonan, sont particulièrement originales, en forme de bateau, comme celui emprunté par les premiers Torajas venus du nord.

Mais le plus étonnant, ce que les touristes viennent photographier, ce sont les rites funéraires. Pour chaque défunt, une cérémonie est organisée dans la maison de celui-ci. Cela dure 3 à 5 jours (voire parfois 7 jours) selon la richesse et la taille de la famille. Les gens viennent de partout pour assister aux nombreuses cérémonies, qui ont lieu majoritairement en juin-juillet-août (ils gardent les maculas, les corps inanimés qui attendent la mort, pendant des mois jusqu’à la cérémonie) et plus il y a de monde, mieux c’est. Tout est parfaitement organisé et rien n’est laissé au hasard. Chacun a sa tâche ou son pavillon pour assister aux festivités. Le chef du village coordonne.
On mange, on boit, on papote, on salue la famille du défunt, mais surtout, on sacrifie. Des buffles principalement, et des cochons apportés par les invités (bon, nous on s’est contenté d’amener des cigarettes, parait que ça se fait). Toujours selon le rang social du défunt, on va sacrifier entre 3 et 16 buffles, devant tout le monde et surtout à proximité du corps du défunt qui doit pouvoir contempler le nombre de buffles sacrifiés pour lui.

En pays Toraja, le buffle est un animal vénéré. Il vaut beaucoup d’argent, plus encore s’il est albinos. Buffles et cochons s’achètent au marché qui se tient une fois par semaine.

Nous assistons aux premier jour des funérailles d’un vieux monsieur, âgé d’une centaine d’années nous dit-on, décédé il y a 6 mois. A l’intérieur de la maison tongkonan, à l’étage, dans la pièce la plus au nord repose la macula, qui attend le sacrifice d’un buffle, signe du passage de la vie à la mort. Avec lui, nous patientons jusqu’au moment où le soleil commence à descendre, peu après midi puisque nous sommes sur l’équateur. On déguste du très traditionnel porc « papillon », du porc cuit dans du bambou et du vin de palme.

Ça y est, c’est l’heure! Ca va très vite: une lame acérée lui tranche la gorge, le buffle se vide de son sang, sans broncher.

Le corps peut mourir et se diriger vers le ciel. La famille proche peut pleurer le défunt et le transporter dans la pièce principale de la maison, où il restera quelques jours jusqu’à ce qu’on l’enterre ou, pour les plus riches, jusqu’à ce qu’on le mette dans une grotte.

L’on procède immédiatement à la découpe du buffle, dont les morceaux sont partagés entre les familles du village, selon leur rang. Puis, c’est le tour des cochons, qui couinent désespérément comme s’ils devinaient le sort qui les attend.

C’est une ambiance joyeuse qui règne  ici autour de la mort. Des rites et des croyances très éloignés de notre bon vieux fonctionnement rationnel. Il nous faudrait des semaines d’immersion pour commencer à comprendre. Mais déjà, il est l’heure de poursuivre notre périple…